CARLOS (don, 1788-1855)

CARLOS (don, 1788-1855)
CARLOS (don, 1788-1855)

CARLOS don (1788-1855)

Le cruel tableau de Goya, La Famille de Charles IV , montre, non loin de son frère Ferdinand VII et des autres membres de la famille, le futur don Carlos, le premier des deux don Carlos de l’histoire contemporaine espagnole.

L’abdication de Bayonne, en 1808, appartient autant à l’histoire de France qu’à celle de l’Espagne. Napoléon obtint que Ferdinand VII rendît la couronne à son père, lequel avait déjà décidé de céder tous ses droits à l’empereur des Français. Le renoncement atteignait également les infants don Carlos et don Antonio, qui vécurent leurs années de captivité en France, jusqu’à la défaite et à la chute de Napoléon. Ce fut alors le brusque retour à l’état de choses antérieur à 1808: la répudiation de la Constitution libérale de Cadix, de 1812, et la répression, jusqu’au sursaut libéral du triennat révolutionnaire de 1820 à 1823, rapidement mis à mal par l’intervention absolutiste des Cent Mille Fils de Saint Louis. Sous le règne de Ferdinand VII, don Carlos appuie le souverain dans sa lutte contre tout ce qui est libéral, afrancesado , révolutionnaire ou même modéré. Il prend même la tête du parti des ultras, des absolutistes, qui attend tout de la politique de la Sainte-Alliance.

Le temps sans histoire des dix années (de 1823 à 1833) qui vont clore le triste règne de Ferdinand VII va s’animer, à partir de 1830 et du quatrième mariage du monarque, avec le problème de la succession. Face à l’éventualité d’une succession ou d’une descendance féminine, le roi promulgue la Pragmatique Sanction (29 mars 1830) qui annulait la loi salique établie par le premier Bourbon d’Espagne, Philippe V, et qui mettait en vigueur l’accord établi par les Cortes de 1789 sur ce point. Cette disposition prise peu de temps après la mort de sa troisième femme et après son remariage avec Marie-Christine, fille du roi des Deux-Siciles, ruinait les espoirs successoraux de l’infant don Carlos et de ses nombreux partisans.

Le problème juridique concernant ladite succession va prendre une importance considérable dans l’histoire de l’Espagne contemporaine, au point que tous les Espagnols auront à prendre parti pour l’un ou pour l’autre. La question dynastique est définitivement posée avec la naissance de l’infante Isabelle en 1830, elle devient brûlante dès l’été de 1832, pendant une année, tandis que le roi se débat entre la vie et la mort, défaisant ce qu’il avait fait la veille. Don Carlos déclare qu’il n’acceptera pas la succession pour sa nièce. La cour est divisée, mais beaucoup d’aristocrates et de membres du clergé appuient l’infant. Le roi décide de déroger à la Pragmatique Sanction et remplace tout le cabinet, le 1er octobre 1832. Don Carlos devient plus encore qu’auparavant le défenseur des institutions de l’Ancien Régime.

Les «volontaires royalistes», dont les effectifs s’élèvent à cent vingt mille hommes, le double de l’armée de la nation, deviennent le danger suprême. Des mesures radicales sont prises contre eux et il se crée un parti de la reine. Aux modérés se joignent les libéraux, exclus depuis 1823 de toute vie politique. Marie-Christine veut faire reconnaître sa fille comme princesse par les Cortes.

La querelle s’envenime. Don Carlos ne cède pas sur le principe, appuyé par sa femme et sa belle-sœur, Marie-Françoise d’Assise de Bragance et la princesse de Beira, sœurs du roi don Miguel de Portugal. De l’autre côté, la princesse Louise-Charlotte, sœur de Marie-Christine, revient d’Andalousie et obtient de son royal beau-frère l’exil de don Carlos et de ses deux rivales. Don Carlos refuse de reconnaître la légitimité des droits de sa nièce et, à la mort de son frère Ferdinand VII, il publie, de la ville portugaise d’Abrantès, un manifeste daté du 1er octobre 1833. Quelques jours plus tard, agissant comme s’il était le roi en exercice, il signe les décrets de Santarém confirmant dans leurs charges les ministres de Ferdinand VII. Cependant, Christine est proclamée régente du royaume. La guerre civile commence. Elle durera près de sept ans.

Don Carlos ne rentre en Navarre, par Urdax, que le 12 juillet 1834. Il peut s’appuyer sur les volontaires royalistes, mais non sur l’armée ni sur la hiérarchie de l’Église. Les commandants, les lieutenants-colonels, les curés, les chanoines le soutiennent, mais non pas l’appareil de l’État, ce qui lui ôte l’espoir de se voir reconnaître la condition de belligérant. D’autre part, ses appuis sont localisés géographiquement. Par chance pour lui, dans les deux premières années, il peut compter sur un grand chef de guerre, Tomás de Zumalacárregui.

L’histoire de la première guerre carliste n’a pas encore été correctement récrite depuis l’œuvre d’Antonio Pirala au XIXe siècle. Les explications sont passionnelles, insuffisantes, politiques; elles ne tiennent pas suffisamment compte des facteurs économiques et sociologiques qui modifieraient considérablement les idées reçues sur le légitimisme dynastique, les sentiments religieux ultramontains et la défense des fueros (privilèges locaux) dans leur seul aspect juridique et institutionnel.

La guerre carliste constitue en grande partie une réplique de la guerre de guérillas du temps de l’Indépendance contre les Français. Les carlistes pouvaient s’appuyer sur la campagne, jamais ou presque sur les villes, même dans les zones les mieux contrôlées. Cela explique la tactique de Zumalacárregui, qui lui permet d’espérer la conquête de Bilbao, sa grande erreur. D’autres succès éphémères viendront des expéditions carlistes faites dans le territoire péninsulaire (Gómez en 1836, don Carlos en 1837 jusque devant Madrid), au milieu de l’indifférence sinon de l’hostilité de la population.

À partir de l’automne de 1837, les divisions s’accentuent dans le camp carliste retranché au Pays basque et en Catalogne. Ses partisans sont de plus en plus conscients de leur incapacité à gagner la guerre. Une campagne pacifiste se développe, basée sur le maintien des fueros pour les Provinces basques et sur l’abandon de la cause dynastique. Les querelles avec les ultras, les assassinats transformés en jugements obligent le nouveau général en chef, Rafael Maroto, à traiter avec le chef des isabelinos , le général Espartero. En septembre 1839, la convention de Vergara marque la fin du conflit, même si les hostilités doivent encore se poursuivre en Catalogne, sous le commandement de l’irréductible Cabrera.

C’est, pour l’heure, le triomphe définitif du libéralisme sur l’Ancien Régime, incarné par don Carlos. Celui-ci se réfugie en France, par les mêmes passages empruntés à son arrivée en Espagne, cinq années auparavant. Il se trouve confiné à Bourges jusqu’en 1854, puis il se rend à Trieste, où il mourra.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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